Confortablement installées sur le front de mer, jouissant d’une vue exceptionnelle vers l’Angleterre, elles se prélassent, les pieds dans l’eau fraîche de la mer du Nord et la tête dans les nuages. Malgré une température estivale, les 6 cocotte-minutes que j’ai en point de mire depuis près d’une heure sur la belle plage de Grand-Fort me font froid dans le dos.
La centrale nucléaire de Gravelines, puisque c’est d’elle dont il s’agit, est une des plus anciennes de France. Elle est la seule à compter six réacteurs. Sa durée de vie, initialement prévue pour une trentaine d’années a été prolongée d’autant. Le lobby nucléaire français a convaincu nos élus de ré-investir des milliards d’euros, payés par le contribuable, pour prolonger la durée de vie de nos centrales et les sécuriser. Avec cinquante-huit réacteurs répartis sur le territoire, la France est un des plus gros producteurs mondiaux d’énergie nucléaire. Incident technique, mouvement de terrain, ras de marée, sécheresse, avions, drones, piratage informatique, attentat, guerre,… On sait que c’est explosif, on sait que l’un des réacteurs va nous péter à la figure, mais tout le monde semble n’y accorder qu’une importance mineure, malgré Tchernobyl et Fukushima. Plutôt que de traiter le sujet à sa source, on préfère calculer le risque et financer chèrement les mesures de ré-habilitation et de protection des installations.
La transition vers les énergies renouvelables se fait au rythme de l’escargot. La société civile et les élus n’ouvrent jamais le débat du nucléaire. Le sujet est timidement abordé lors des élections nationales. Il est sans doute encore possible de corriger le tir en matière d’écologie pour transmettre une planète vivable aux générations futures. Pourtant, je suis très pessimiste sur nos chances de passer au travers d’un incident nucléaire majeur.
Et pourtant, cette nuit, je vais la passer à Gravelines, à moins de deux kilomètres de la centrale !